Cordonnier Avocat en Garantie Décennale à Lille

La garantie décennale : un pilier du droit de la construction
La garantie décennale est un mécanisme juridique essentiel dans le domaine de la construction, conçu pour protéger le maître de l’ouvrage (le client) contre les désordres graves survenant après la réception des travaux. Cette garantie couvre la réparation de certains vices ou dommages pendant une période de dix ans à compter de la réception des travaux. Elle est considérée comme une assurance fondamentale en cas de construction neuve ou de rénovation complète du bâti.
Qu’est-ce que la garantie décennale ?
La garantie décennale, dont le fondement légal se trouve notamment dans l’article 1792 du Code civil, a pour objectif de réparer tout dommage qui compromet la solidité de l’ouvrage. Elle couvre également les dommages qui, affectant l’ouvrage dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination. L’impropriété à destination signifie que le désordre rend l’ouvrage inapte à l’usage auquel il était destiné. De manière générale, un ouvrage présentant un danger pour la sécurité des personnes relève de la garantie décennale.
La gravité du désordre est une condition essentielle pour pouvoir actionner la garantie décennale. Des exemples de désordres graves incluent les fissures importantes compromettant la solidité, les problèmes majeurs d’étanchéité (toiture, murs), le glissement de terrain affectant la structure, l’affaissement du sol, ou des défauts rendant le bâtiment inhabitable ou impropre à l’usage prévu. En revanche, les dommages purement esthétiques, comme des fissures superficielles ou des variations de teinte, ne sont pas couverts ( poignet de porte cassée, peinture mal réalisée…)

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Maître Justine Cordonnier, avocat en droit Immobilier et la Construction à Lille, vous accompagne dans vos problématiques juridiques liés à la garantie décennale.

Justine Cordonnier, Avocat
Champ d’application de la garantie décennale
La garantie décennale s’applique à la réalisation d’ouvrages. Naturellement, les immeubles sont concernés, mais d’autres constructions peuvent également en bénéficier. La jurisprudence a notamment considéré divers éléments comme des ouvrages couverts par la garantie décennale, tels qu’un enrochement, une digue d’étang, un drain, une dalle de béton sous une piscine, un mur de soutènement, une cheminée, des panneaux photovoltaïques, des clôtures, ou de lourds travaux de rénovation. Elle est obligatoire dès lors que sont entrepris des travaux de construction, d’extension et de rénovation sur la structure d’un bâtiment.
Les éléments couverts par la garantie incluent le gros œuvre (fondations, murs, charpente, toiture, planchers, terrassement, génie civil). Elle s’étend également aux éléments d’équipement indissociables de l’ouvrage, c’est-à-dire ceux qui ne peuvent être démontés ou remplacés sans détériorer le bâtiment, comme les canalisations encastrées, le chauffage central, l’installation électrique encastrée ou les huisseries. Certains aménagements comme les piscines enterrées, vérandas, terrasses avec fondation, garages, entrepôts ou ateliers peuvent aussi être couverts.
Qui est concerné par la garantie décennale ?
Les personnes assujetties à l’obligation d’assurance
Il s’agit principalement des constructeurs d’ouvrage, des entrepreneurs, ou tout autre professionnel de la construction lié au maître de l’ouvrage par un contrat de louage d’ouvrage. Sont visés l’architecte, l’entrepreneur, les techniciens (comme les contrôleurs techniques ou coordonnateurs de travaux lorsqu’ils réalisent des travaux), les constructeurs-vendeurs (constructeur de maisons individuelles, vendeur d’immeuble à construire ou après achèvement), et les constructeurs-mandataires (promoteurs immobiliers).
La souscription à une assurance décennale est obligatoire pour un professionnel de la construction. L’article L. 241-2 al. 2 du Code des assurances impose à l’entrepreneur de justifier de cette assurance avant l’ouverture de tout chantier. L’attestation d’assurance décennale doit impérativement couvrir une période de validité incluant le jour de la déclaration d’ouverture du chantier. Sans cela, la garantie décennale pourrait ne pas pouvoir jouer.
L’absence d’assurance décennale d’un entrepreneur engage sa responsabilité et constitue une infraction pénale passible de 6 mois d’emprisonnement et d’une amende de 75 000 €. La responsabilité personnelle du gérant d’une société de construction peut même être engagée en cas de non-souscription d’assurance décennale, la Cour de cassation ayant jugé cela comme une faute intentionnelle séparable des fonctions sociales.
Les personnes bénéficiaires de l’assurance
Les bénéficiaires sont le maître de l’ouvrage (la personne pour le compte de laquelle les travaux sont réalisés). En cas de vente du bien immobilier construit ou rénové dans le délai de 10 ans, la garantie décennale est transférée aux acquéreurs successifs. Le nouvel acquéreur devient ainsi bénéficiaire de la garantie et peut s’en prévaloir s’il découvre un désordre de nature décennale.

Mise en œuvre et particularités de la garantie décennale
La garantie décennale repose sur une présomption de responsabilité sans faute. Cela signifie que son mécanisme d’action est facilité. La détermination de la cause exacte des désordres est généralement sans incidence sur le droit à réparation des victimes. La mise en jeu de la responsabilité décennale n’exige pas la recherche de la cause des désordres. L’assurance de responsabilité décennale est maintenue depuis la date d’effet du contrat d’assurance couvrant l’intervention de l’assuré sur le chantier, jusqu’à l’expiration de la durée de la responsabilité décennale du constructeur, même en cas de résiliation du contrat pendant cette période. L’assurance décennale peut être mobilisée par le maître d’ouvrage même si l’assuré (l’entrepreneur) dépose le bilan.
Pour activer la garantie, le constructeur assuré doit déclarer le sinistre à son assureur dans un délai de cinq jours à compter de sa connaissance. Une déclaration tardive peut entraîner la déchéance de sa garantie si l’assureur subit un préjudice, mais cette déchéance est inopposable au tiers lésé.
L’importance de la réception des travaux
La réception des travaux est une étape indispensable. Sans réception formalisée par un procès-verbal, la garantie décennale ne s’applique pas. La réception doit être effectuée avec attention, car tout désordre apparent doit être réservé et constaté. Une réception prononcée sans réserve malgré la présence d’un vice connu du maître de l’ouvrage fait obstacle à l’action en garantie décennale pour ces désordres apparents.
Action directe du tiers victime
Le tiers lésé (maître d’ouvrage, acquéreur successif) peut exercer une action directe contre l’assureur de responsabilité décennale du constructeur. Cette action se prescrit par dix ans à compter de la réception des travaux. La victime peut choisir le tribunal compétent, soit celui du siège de l’assureur, soit celui de son propre domicile ou de l’un des défendeurs.
Les causes d’exonération de la garantie décennale
Dans certains cas particuliers, la garantie décennale pourrait ne pas s’appliquer. Les causes d’exonération possibles incluent :
- L’immixtion fautive du maître de l’ouvrage en cours de travaux, ce qui prive les professionnels de leur libre-arbitre. Il est important de suivre le chantier à distance sans s’immiscer de manière excessive.
- L’acceptation des risques par le maître de l’ouvrage. Il n’y aura pas de garantie décennale si le maître de l’ouvrage avait une connaissance parfaite du risque encouru par la construction et a délibérément choisi de poursuivre. Un exemple est le choix conscient d’un site sujet à effondrement sans réaliser les renforcements nécessaires.
- L’utilisation anormale des lieux par le maître de l’ouvrage. Cela peut le priver du bénéfice de la garantie décennale, comme un sas humide dont la porte n’était jamais fermée ou le dépassement des charges maximales autorisées sur un mur de soutènement.
- Des causes étrangères, notamment la force majeure. Une catastrophe naturelle, par exemple, peut aboutir à une exonération pour le professionnel, l’assurance de la victime pouvant alors être actionnée.

Le rôle essentiel de l’avocat en matière de garantie décennale
Les problématiques liées à la garantie décennale sont souvent complexes, mêlant des difficultés techniques et juridiques relevant du droit de la construction et du droit des assurances. Faire appel à un avocat spécialisé en droit de la construction est vivement recommandé en cas de désordres de nature décennale. L’expertise d’un avocat est essentielle pour naviguer dans ces situations complexes.
Un avocat pratiquant régulièrement ces questions peut vous apporter une assistance précieuse. Il peut notamment :
- Analyser votre dossier et déterminer les actions opportunes à engager.
- Vous assister dans le cadre des négociations amiables avec l’entreprise et/ou l’assureur.
- Faire valoir vos intérêts lors des expertises amiables et/ou judiciaires. Une procédure judiciaire d’expertise en référé est l’un des moyens d’interrompre la prescription décennale.
- Engager une action judiciaire en indemnisation ou assurer votre défense contre une telle action. Cela inclut la possibilité d’agir directement contre l’assureur.
- Vous défendre en cas de refus de garantie de l’assureur décennal. Les assureurs peuvent tenter d’opposer un refus de garantie pour diverses raisons (désordre apparent, gravité insuffisante, absence de réception des travaux).
- Vous aider à constituer un dossier solide (réunir les preuves, expertises, correspondances).
- Rédiger et envoyer des mises en demeure à l’entreprise ou à l’assureur.
- Vous guider dans le respect des délais légaux, qui sont parfois difficiles à maîtriser, et assurer le respect des procédures.
- Obtenir une indemnisation pour les désordres. L’avocat peut également trouver des solutions d’indemnisation tierces si la garantie décennale ne peut être actionnée.
- Obtenir une indemnisation complémentaire au titre de préjudices immatériels, comme le préjudice moral ou le préjudice de jouissance.
- Assister les entreprises assignées en justice pour que leurs assurances responsabilité décennale soient mises en cause et prennent en charge les condamnations éventuelles.
Chaque dossier étant singulier, des conseils personnalisés sont nécessaires pour bénéficier de la meilleure défense possible. L’avocat vous permettra de sécuriser au mieux vos intérêts.
Recours en cas d’expiration de la garantie décennale
Si la garantie décennale est expirée, le maître de l’ouvrage ou l’acquéreur peut potentiellement agir sur d’autres fondements juridiques :
- La garantie des vices cachés, à laquelle le vendeur de l’immeuble peut être tenu. Cette garantie s’applique en cas de contrat de vente et si le vice était invisible au moment de la vente. Elle se prescrit par 2 ans à compter de la découverte du vice.
- La responsabilité contractuelle du constructeur pour faute dolosive. La faute dolosive implique une violation délibérée et consciente des obligations contractuelles, même sans intention de nuire (exemples : réalisation d’un mur sans fondations, installation non conforme). Cette action est soumise à une prescription de cinq ans à partir du jour où les faits ont été connus par le maître d’ouvrage.
En conclusion, la garantie décennale offre une protection cruciale contre les désordres graves affectant la solidité ou l’usage d’un ouvrage pendant 10 ans après sa réception. Compte tenu de la complexité technique et juridique de sa mise en œuvre, l’accompagnement par un avocat spécialisé en droit de la construction est un atout majeur pour défendre efficacement vos droits et optimiser vos chances d’obtenir réparation.